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Siegfried Kessler, pianiste de jazz sarrois, est un personnage hors norme. Il a vécu plus de vingt ans à La Grande-Motte sur un voilier de course amarré au bout du pont F. « F comme fa dièse », aimait-il préciser. Son bateau, c’ét ... more
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Siegfried Kessler, pianiste de jazz sarrois, est un personnage hors norme. Il a vécu plus de vingt ans à La Grande-Motte sur un voilier de course amarré au bout du pont F. « F comme fa dièse », aimait-il préciser. Son bateau, c’était toute sa vie, c’était son amour. Il aurait pu aussi bien dire, comme Novecento le pianiste d’Alessandro Barrico, « la terre, c’est un bateau trop grand pour moi. C’est un trop long voyage... Pardonnez-moi. Mais je ne descendrai pas ». Mais si Kessler a été un grand marin, il fut aussi tout entier musique. Tout entier jazz. Les touches de son piano vibraient comme un nuage d’argent qui s’ouvre et déverse sa fureur. Kessler prenait la mer autant que possible, c’était un fou du grand large. Mais « on n’est pas fou quand on trouve un système qui vous sauve ». En 2002, pendant presque une année et munie d’une petite caméra DV, Christine Baudillon avait accompagné Siegfried Kessler. Il en résulte ce portrait filmé « quasi improvisé libre ». A Love Secret est saisissant à la fois pour la proximité avec Kessler, mais aussi pour le rythme et les images du film parfaitement au diapason du pianiste. Des plans fixes, des longs cadrages, des gros plans figés, des portraits immobiles, des angles uniques… font ressortir le jeu de l’acteur, le bateau qui glisse sur l’eau, la Volkswagen qui tourne en rond, les mouettes qui traversent l’écran etc. Le parti-pris d’un sujet en mouvement dans un décor fixe, filmé avec une sobriété élégante, permet de se concentrer sur le sujet et de mettre en relief la musique. Baudillon laisse son acteur se mettre en scène et dérouler son solo de bout en bout. Et quel acteur ! Kessler joue son propre rôle avec une présence extraordinaire. La construction du film s’articule autour d’une introduction, de trois parties et d’une conclusion. L’introduction donne le ton : une vue plongeante sur la main de Kessler qui interprète la Chaconne dans sa transcription par Brahms. L’immobilité élégante du piano coupé en diagonale, des éclats noirs et blancs des touches et du reflet des cordes tranchent avec la mobilité précise de la main et de la musique. Ce somptueux morceau traduit à merveille la tension et l’émotion contenues dans le documentaire du début à la fin.
Title category Books in French ARTS ET BEAUX LIVRES
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